dimanche 28 juin 2009

Laissez parler les petits papiers

Un dimanche soir, dans le train qui me ramène à Paris.

Décidément le train m'inspire et me donne envie d'écrire. 


Je n'ai pas encore réussi à donner un vrai sens à ce blog, et je vais faire sans doute un peu ici du méta-billet, du billet sur le billet. 

Il y a quelques mois, quand Nerval m'avait conseillé de commencer un blog, je lui avais objecté que je ne trouverais rien à raconter. Je n'avais pas l'intention de faire un blog sur ma vie, et je n'avais pas de hobbie à faire partager (philatélie, macramé ou taxidermie). Il n'avait pourtant aucun doute sur le fait que je trouverais toujours quelque chose pour m'inspirer.


Force est de constater qu'il n'avait pas tort. J'aime l'anecdotique, car au fond, rien ne l'est vraiment. 

Quelque part, il m'est beaucoup plus facile de laisser courir mon clavier à l'égard de silhouettes croisées une fois et pour lesquelles je peux me permettre d'imaginer une vie, qu'à l'égard de ceux qui m'ont touché, me touchent ou me toucheront plus que l'espace de quelques secondes. 


Ici on ne trouvera que rarement évoqués, et de façon sibylline, ces amis sans nouvelles de qui je ne peux passer une semaine.

On trouvera plus volontiers ces relations que je connais que mal, ces visages qui vous entourent mais ne comptent pas vraiment.

Ici on ne trouvera pas ces ours bourrus, ces vrais-faux artistes et ces esprits décalés qui ont pu troubler mon esprit et mon palpitant.

On trouvera plutôt ces échanges de regards suburbains, qui, le temps d'un sourire qui vous répond mais que vous ne reverrez jamais, donnent du relief à votre journée, ou encore ces tentatives d'approches ridicules, qui, quand vous y repensez, valent de s'y attarder quelques lignes.


Pendant quelques années, vous pensez que vous êtes un peu bizarre.

Vous êtes la fille un peu timide, mais qui a toujours une imagination débordante.

Vous vous dites qu'effectivement, vous avez peut-être une sensibilité aux choses un peu différente des autres, mais que cela ne doit pas être bien grave.


Et puis un jour, parce que cela vous a toujours un peu attiré, vous vous inscrivez à un atelier de théâtre. 

Là-bas, il y a plein de gens aussi bizarroïdes que vous.

Vous vous découvrez capable de choses que vous n'auriez jamais imaginées faire.

Simuler un orgasme façon doublage de mauvais porno avec l'un des participants du groupe. Assumer un surnom à vos yeux extrêmement péjoratif devant deux cent personnes.  


Vous délaissez le théâtre pendant quelques temps, puis, intégrez un nouveau cursus dans une autre ville.

Probablement ne vous doutiez-vous pas qu'au cours de ces deux années, vous développeriez autant votre sensibilité artistique que votre capacité à faire des cafés et des photocopies pour vos maître de stages.


Vous n'y tenez plus et réintégrez un nouveau cours de théâtre. 


Et de ce jour, les rencontres s'enchaîneront.

Votre professeur tout d'abord. Légèrement égocentrique et désorganisé sur les bords, à l'opposé de l'intervenant qui vous dirigeait deux ans plus tôt, structuré et académique. Il vous donne néanmoins des clés indispensables et croit en votre potentiel.


Puis Nerval le grand, cité un peu plus haut. 

Chroniqueur, auteur, dessinateur, photographe, ce garçon vous épate par sa créativité protéiforme et sa capacité à structurer instantanément une histoire d'un point de vue dramaturgique. Très vite, vous trouvez votre alter ego d'écriture, mué par les mêmes doutes et le même ton décalé. Vous découvrez les premières séances d'écriture à quatre mains. Vous affrontez vos mots, ceux qui devront faire réagir le même public. 


L'aventure théâtreuse se termine et vous cherchez de quoi vous rétablir. 


Légèrement à votre insu, une amie parle de vous à son compagnon guitariste.

Quelques mois plus tard, vous voilà embarquée dans des répétitions à quatre voix et seize cordes. 


Tout ça parce qu'un beau jour, une première personne vous a pris au sérieux.

Et, qu'en conséquence, vous avez commencé à travailler plus sérieusement.

L'appétit vient en mangeant, l'inspiration en créant.


A force de vous éparpiller, vous avez l'impression de tout faire en médiocrité, mais c'est plus fort que vous, vous n'arrivez pas à choisir.

Pléthore de projets naissent et ne voient pas le jour. Cette pièce, en co-écriture avec l'un de vos amis dont vous admirez la plume noire et acide. Ce roman, qui traîne sur votre laptop depuis des mois et des mois, mais pour lequel vous peinez à consacrer des soirs. Ces répétitions qui manquent de régularité tant il est difficile de composer avec quatre emplois du temps surchargés. Ce rôle qu'on vous propose, mais que vous vous voyez obligé de décliner, car quatre soirs par semaine sachant que vous êtes déjà débordée, c'est un peu compliqué à gérer.


Et puis vous passez des semaines comme celles-ci.

Lundi, vous faites la rencontre d'un nouveau comparse d'écriture précaire.

Vous vous êtes retrouvés un peu par hasard en tête à tête : deux heures, une bière, quatre brochettes et deux sakés plus tard, vous vous êtes trouvés énormément de points communs. Cela faisait longtemps que vous n'aviez pu discuter avec un écrivaillon à mi-temps, qui peine autant que vous à donner corps à ses projets entre deux métro-boulot-dodo. Ca ressemble un peu à une réunion de blogueurs anonymes. Vous vous retrouvez dans l'addiction aux mots, aux idées, aux personnages, aux détails qui accrochent votre regard et votre plume.

Vous lui enviez son idée de blog, qui confronte billets masculins et féminins sur un même thème.

Mieux, le jeune auteur vient de boucler un long métrage. Admirative, vous êtes rassurée de constater que l'on peut trouver le temps de travailler, et de donner vie à des projets, ce qui vous fait prendre de bonnes résolutions d'écriture une fois la porte de votre appartement passée. Le lendemain, vous allez voir une représentation dont le thème ne vous plaît que moyennement. Cependant, elle vous rappelle à ce que vous ne voulez pas faire : du comique autocentré et des reprises musicales qui pour beaucoup vous obligent à faire abstraction des interprètes pour n'écouter que le groupe qui joue derrière. Le soir d'après, vous écoutez ce comédien qui, en une réplique banale, fait rire une salle entière. Vous terminez votre semaine sur la nouvelle pièce d'un de vos amis et passez une partie de la soirée à écouter le metteur en scène le reprendre sur ses placements, son rythme et sa diction. 


Parfois je réalise à côté de quoi je serais passée, si un jour on ne m'avait pas prise au sérieux.

Probablement, comme le disait C. dans son dernier billet, à côté d'une bonne thérapie, et pour le paraphraser, voilà un billet parfaitement inutile, mais qui fait du bien.




6 commentaires:

  1. Il est vrai que je me reconnais largement là dedans. Va savoir pourquoi... en tout cas, chouette billet, ça m'a rappelé des trucs.

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  2. Yes, tous les mêmes barbouilleurs de blogs :)
    Et tout est vrai, notamment mon admiration pour le fait que tu boucles autant de scenar ^^
    A très vite!

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  3. Rhoooo merci mzelle, je suis touche ! Ce qui est marrant c'est que, dans des styles differents et abordees sous angles differents, on parle pourtant tres souvent des memes choses sur nos blogs respectifs. Longue continuation a ce blog mais plus que tout, a ta plume ! Et plein de bisous numeriques (faute de mieux).

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  4. Bah oui, on a toujours été sur la même longueur de plume sweetie. Vivement ton retour, et plein de mwah numériques en attendant une petite soirée retrouvailles!

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  5. Je ne dirais pas un billet parfaitement inutile, bien au contraire. Je l'ai lu avec avidité. En plus ça me donne envie d'écrire !

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  6. Oh ben alors, si je génère une scriptomanie, continuons, continuons!

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